Sécuriser les refus de titularisation en fin de stage.
Le Conseil d’État considère que, sauf si les faits reprochés constituent des fautes disciplinaires (CE 24 févr. 2020, n° 421291, Cne de Marmande), la décision de refus de titularisation du stagiaire « est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne », une telle décision « n’est pas au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l’intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier » (CE, sect., 3 déc. 2003, n° 236485).
Pour autant, sur le fondement de l’article L. 121-1 du Code des relations entre le public et l’administration, certaines juridictions de première instance ont commencé a opéré un revirement.
Les dispositions de l’article L. 121-1 prévoient que, en sus des décisions qui doivent faire l’objet d’une motivation obligatoire (listées à l’art. L. 211-2), « les décisions qui […] sont prises en considération de la personne sont soumises au respect d’une procédure contradictoire préalable ».
L’article L. 121-2 du même code prévoit bien une exception à l’obligation de motivation concernant les relations agent – administration, mais celle-ci ne s’étend pas aux décisions « prise en considération de la personne » (« Les dispositions de l’article L. 121-1, en tant qu’elles concernent les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l’article L. 211-2, ne sont pas applicables aux relations entre l’administration et ses agents » – art. L. 121-2 CRPA).
Plusieurs tribunaux administratifs ont fait application de cette disposition dans le contentieux de la fonction publique (par ex., à propos de la décision de fixer le taux d’une indemnité versée à un agent en fonction de sa valeur professionnelle, TA Paris, 21 janv. 2019, n° 1713722). Un récent jugement du TA de Besançon en fait également application en matière de refus de titularisation des stagiaires (TA Besançon, 24 septembre 2020, n° 1901757) :
« 4. Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire et ne dispose d’aucun droit à être titularisé. La décision de ne pas le titulariser en fin de stage n’a ainsi pour effet ni de refuser à l’intéressé un avantage qui constituerait pour lui un droit ni, dès lors que le stage a été accompli dans la totalité de la durée prévue par la décision de nomination comme stagiaire, de retirer ou d’abroger une décision créatrice de droits. Une telle décision n’est dès lors pas au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration.
- Toutefois, cette décision, qui est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur l’aptitude à exercer les fonctions auxquelles l’agent peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, se trouve prise en considération de sa personne. Aucune procédure contradictoire particulière, au sens du 3° de l’article L. 121-2 du code des relations entre le public et l’administration, n’ayant été instituée, une telle décision doit ainsi, conformément aux dispositions de l’article L. 121-1 du même code, être précédée de la procédure contradictoire préalable définie à l’article L. 122-1 de ce code, laquelle constitue une garantie.
- Il est constant que Mme X. n’a pas été mise à même de présenter ses observations préalablement à la décision refusant de la titulariser. La requérante est dès lors fondée à soutenir que l’arrêté attaqué a été adopté à l’issue d’une procédure irrégulière et qu’elle a été effectivement privée de la garantie prévue par l’article L. 122-1 du code des relations entre le public et l’administration. »
Le Conseil d’Etat rappelant également que « la décision de ne pas titulariser [un agent] en fin de stage est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne » (CE 24 févr. 2020, n° 421291, Cne de Marmande), il est fort probable qu’il opère un revirement de jurisprudence prochainement.
L’obligation de reclassement des agents contractuels d’une régie dotée de la personnalité morale s’étend à la commune
Par une décision du 14 janvier 2021 (CAA Lyon, 14 janvier 2021, req. n°18LY03413), la Cour administrative d’appel de Lyon a estimé que la Commune qui prend la décision de dissoudre une régie dotée de la personnalité morale se voit imposer une obligation de reclassement au sein de ses propres effectifs des agents contractuels employés par la régie :
« S’il appartient à l’autorité territoriale compétente de la régie d’inviter l’agent contractuel qu’elle entend licencier, à raison de la suppression de son emploi, à présenter une demande écrite de reclassement, en application des dispositions de l’article 39-5 du décret n° 88-145 du 15 février 1988, le maire de la commune, qui est chargé de procéder à la liquidation de la régie, est tenu, quant à lui, de chercher à reclasser, dans un emploi pouvant légalement être occupé par un agent contractuel, l’agent qui n’a pas pu faire l’objet d’un reclassement de la part de la régie. »
En effet, dès lors que l’article R. 2221-17 du Code général des collectivités territoriales dispose en son 3ème alinéa que « L’actif et le passif de la régie sont repris dans les comptes de la commune », les contrats de travail faisant comptablement partie de l’actif d’une régie, la Commune est tenue de reprendre les contrats de travail de la régie, y compris si celle-ci est dotée de la personnalité morale, pourvus que ceux-ci soient toujours en cours.
L’agent qui occupe un emploi fonctionnel ne peut se porter candidats aux élections des représentants du personnel
« Pour l’application du I de l’article 9 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, du quatrième alinéa de l’article 4, ainsi que des articles 11 et 12 du décret n° 85-565 du 30 mai 1985, les agents détachés ou recrutés sur un emploi fonctionnel de directeur général (DGS) ou de directeur général adjoint (DGA) des services d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ne peuvent se porter candidats aux élections des représentants du personnel au sein du comité technique, dès lors qu’ils doivent être regardés, eu égard à la nature particulière de leurs fonctions, comme ayant vocation à représenter la collectivité ou l’établissement employeur. » (CE, 26 janvier 2021, req. n° 438733).
Précisions sur les conditions de placement en disponibilité d’office
Un récent arrêt du Conseil d’Etat (CE, 26 janvier 2021, req. n° 430790) revient sur les conditions de la disponibilité d’office pour cause d’inaptitude, en l’espèce dans la fonction publique d’Etat. Un fonctionnaire en position d’activité a droit à plusieurs types de congés (maladie, longue durée…).
Conformément aux dispositions de la Loi du 11 janvier 1984 (art. 34, 51 et 63) et du décret du 14 mars 1986 (art. 09 et 42 notamment), à l’expiration des droits à congés de maladie soit, s’il est apte, l’agent est reclassé sur un autre emploi, soit il est radié des cadres avec possibilité de percevoir une pension, soit il est placé pour une durée d’un an, renouvelable à deux reprises, en disponibilité sur demande de l’intéressé ou d’office.
« Lorsque, pour l’application du 4° de l’article 34 et du dernier alinéa de l’article 51 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, de l’article 43 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985, des articles 42, 47 et 48 ainsi que du premier alinéa de l’article 9 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, le comité médical supérieur est saisi d’une contestation de l’avis du comité médical, il appartient à l’employeur de prendre une décision provisoire dans l’attente de son avis pour placer le fonctionnaire dans l’une des positions prévues par son statut.
Si l’agent a épuisé ses droits à congé de longue durée et ne peut reprendre le service en raison de l’avis défavorable du comité médical, la circonstance que l’administration ait saisi le comité médical supérieur ne fait pas obstacle à ce que l’intéressé soit placé, par une décision à caractère provisoire et sous réserve de régularisation ultérieure par une décision définitive statuant sur sa situation y compris pendant la période couverte par la décision provisoire, en disponibilité d’office.
S’il résulte des articles 42, 47 et 48 du décret du 14 mars 1986 que les décisions admettant d’office à la retraite l’agent ayant épuisé ses droits à congés, celles qui le placent d’office en disponibilité dans le cas particulier où le congé avait été accordé dans les conditions mentionnées au dernier alinéa de l’article 48 de ce décret et, en toute hypothèse, les décisions renouvelant pour la troisième et dernière période d’un an la mise en disponibilité d’office requièrent l’avis préalable de la commission de réforme, cette exigence n’est toutefois pas applicable à une décision provisoire prise en l’attente de l’avis du comité médical supérieur, l’avis de la commission de réforme, puis la décision définitive elle-même, ne pouvant intervenir qu’après que ce comité se sera prononcé sur l’inaptitude présumée de l’agent. »
Précisions sur l’obligation de motivation de l’avis de la CAP statuant en matière disciplinaire
L’exigence de motivation, prévue par l’article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, de l’avis de la commission administrative paritaire (CAP) compétente siégeant en conseil de discipline constitue une garantie. Cette motivation peut être attestée par la production, sinon de l’avis motivé lui-même, du moins du procès-verbal de la réunion de la CAP comportant des mentions suffisantes. Dans le cas où aucun avis motivé de la CAP siégeant en conseil de discipline ni même aucun procès-verbal de sa réunion ne sont produits devant le juge, l’exigence de motivation de l’avis du conseil de discipline ne peut être regardée comme ayant été respectée (CE, 12 février 2021, req. n° 435352).
Contours de la compétence de l’exécutif local pour se prononcer sur la demande de protection fonctionnelle d’un agent détaché sur emploi fonctionnel
Mme D, attaché territorial principal occupe le poste de directeur général des services de la communauté de communes des Pays de l’Aigle. Elle relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa requête tendant à l’annulation de la décision par laquelle le président de la communauté de communes des Pays de l’Aigle a refusé sa demande de protection fonctionnelle.
La CAA de Nantes (CAA Nantes, 2 février 2021, n° 19NT01828) estime que :
« 3. Compte tenu de la nature particulière des fonctions exercées auprès du chef de l’exécutif territorial par un agent détaché sur un emploi fonctionnel prévu à l’article 53 de la loi du 26 janvier 1984, l’autorité compétente pour se prononcer sur la demande de protection fonctionnelle présentée par cet agent est directement cette seule autorité. Toutefois, il résulte du principe d’impartialité que le supérieur hiérarchique mis en cause à raison d’actes insusceptibles de se rattacher à l’exercice du pouvoir hiérarchique ne peut régulièrement, quand bien même il est l’autorité compétente pour prendre une telle décision, statuer sur la demande de protection fonctionnelle présentée pour ce motif par son subordonné. Le chef de l’exécutif territorial ne peut donc, par exception à sa compétence de principe, régulièrement, sans méconnaître le principe d’impartialité, se prononcer lui-même sur une demande de protection fonctionnelle au titre d’agissements constitutifs de harcèlement faisant état de circonstances objectives mettant sérieusement en cause son propre comportement. »
En l’espèce, la Cour estime que dans le cadre de l’instance, Mme D. n’a pas présenté de circonstances objectives mettant sérieusement en cause le comportement du président en raison d’actes insusceptibles de se rattacher à l’exercice du pouvoir hiérarchique, de sorte que ce dernier a pu, sans méconnaître le principe d’impartialité, se prononcer lui-même sur la demande de protection fonctionnelle de l’agent.